Dossier – Les paramètres de base en aquariophilie marine
En eau douce, comme en eau de mer, il est important de maîtriser dans un premier temps quelques paramètres d’eau de base. C’est leur stabilité qui garantit la santé des habitants de votre aquarium marin. En effet, baignés dans l’eau de mer, c’est grâce à ses paramètres physiques et aux éléments qui y sont dissous, que les animaux et autres formes de vie peuvent s’y développer. Comme l’on ne pourrait pas survivre dans une atmosphère qui n’est pas adaptée à nos besoins physiologiques, la vie animaux aquatiques dépend aussi des caractéristiques de l’eau.
Le but de cet article est de donner les bases aux non-initiés pour comprendre l’essence de ces paramètres, leur importance en aquariophilie, et quelques pistes pour leur gestion, sans pousser à une thèse de physique, chimie ou biologie. D’autres articles traiteront de paramètres à maîtriser lorsque l’on souhaite pousser ses connaissances et sa maîtrise aquariophile un peu plus loin.
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La température
A l’exception des mammifères marins, les animaux aquatiques sont ectothermes (ceux qu’on dit « à sang froid »). On trouve également le terme poïkilotherme. Leur température corporelle est directement influencée par celle de leur milieu. Ainsi, toute leur activité métabolique est relative à cette température. Dans une eau plus froide, les poissons ont globalement une activité ralentie. Entre autres, leur digestion et leurs mouvements sont diminués, et la reproduction est poussée en arrière-plan d’un point de vue dépenses énergétiques.
A l’inverse, dans une eau chaude, l’activité générale des animaux aquatiques augmente, et en milieu naturel, c’est en général après la remontée de la température que la plupart des animaux se reproduisent.
Ironiquement, plus l’eau est chaude, moins elle est saturée en oxygène, alors que les animaux en consomment plus. C’est pourquoi la hausse des températures des masses d’eau pose globalement un problème vis-à-vis de la vie qui s’y développe.
En aquarium, il est important de se focaliser sur l’intervalle de température accepté par les animaux que vous souhaitez maintenir, et de maintenir ensemble des espèces aux mêmes besoins thermiques.
- Valeurs cibles
A quelques très rares exceptions, les espèces présentes sur le marché pour nos aquariums marins se plaisent dans une eau comprise entre 23 et 26°C.
- Mesure
Il existe des thermomètres « classiques » à placer dans un coin brassé de l’aquarium, ou ceux à sonde déportée. La température se lit plusieurs minutes après avoir placé le thermomètre dans l’eau, le temps que la mesure se stabilise. Les thermomètres « bandes » à coller contre la vitre sont peu précis.
- Gestion
Grâce aux systèmes de chauffage (thermoplongeur généralement) ou de refroidissement (ventilateurs ou groupes froids), la température est facilement gérée. Branchés sur thermostat (ou avec thermostat intégré), ils permettent de maintenir une température stable toute l’année.
A noter qu’en été, l’évaporation augmente : installez un système de compensation automatique d’évaporation, ou pensez à garder un œil sur les niveaux d’eau et compensez manuellement. Sans cela, la concentration de chaque élément contenu dans l’eau augmente (sels, minéraux, polluants, nutriments…). Ceux-ci ne s’évaporent pas quand l’eau s’évapore !
La salinité / densité
L’eau de mer se caractérise par ses sels dissous. Ici, il n’est nullement question de répondre à l’éternelle question « Pourquoi la mer est salée ? ». On retrouve communément deux unités relatives à la quantité de sels dissous dans l’eau dans le jargon aquariophile (mais il en existe d’autres, utilisées en chimie et physique) : la salinité et la densité.
La salinité correspond au poids des sels dissous dans l’eau, en grammes de sels par kilogrammes d’eau (extrapolé en grammes par litre – g/L – car un litre d’eau pure pèse un kilogramme). Elle peut également être exprimée en « PPT » sur certains appareils, plus rares en aquariophilie.
La densité est le rapport entre le poids (ou plutôt la masse) de l’eau de mer et l’eau douce (1000 kg/m3). C’est une grandeur sans unité. On la retrouve sur certains appareils de mesure sous la dénomination anglaise « Specific gravity ».
Enfin, certains appareils donnent la masse volumique, en kg/m3, soit le poids de 1000 L d’eau de mer.
Alors que la salinité est indépendante de la température de l’eau, la densité, elle, est calculée en fonction de ce paramètre.
Les variations de salinité/densité de l’eau de votre aquarium peuvent être causées par :
- L’évaporation : l’eau s’évapore, pas les minéraux.
- La maintenance du bac : mettre les mains dans l’eau et les ressortir fait exporter de l’eau de mer du bac, et donc du sel, l’écumeur exporte du sel dans le godet
- La capillarité le long des appareils : l’eau peut « remonter » par attraction physique le long des câbles, des angles des vitres et appareils. L’eau s’y évapore, créant des « croûtes » de sel.
- Valeurs cibles
Pour l’aquariophilie récifale, on recommande une salinité de 35 g/L soit, à 25°C, une densité de 1,026 ou encore une masse volumique de 1023-1024 kg/m3.
En aquarium marin peuplé de poissons uniquement (« Fish Only »), il est possible de les baisser respectivement à 31 g/L soit 1,023.
A noter que selon le taux d’humidité du sel acheté, et de son stockage entre son ouverture et son utilisation, on peut être amené à dissoudre 35 à 38 g/L dans un litre d’eau de mer pour obtenir une densité de 1,026. Ce delta de poids correspond à l’humidité ambiante s’étant adsorbée au sel. De plus, certains sels contiennent d’autres éléments ne rentrant pas en jeu pour la densité comme des composants stimulant l’activité des bactéries, des vitamines, etc. Ceux-ci augmentent aussi donc le poids de « sel » à ajouter pour obtenir la bonne densité.
- Mesure
Il existe sur le marché trois appareils majeurs de mesure de la densité / salinité :
- Les aéromètres à aiguille
- Les densimètres flotteurs en verre
- Les réfractomètres
Il est important de les rincer à l’eau osmosée et sécher avant et après chaque utilisation. Le réfractomètre doit être calibré très régulièrement. Certains tests ICP vous donnent également une valeur calculée de la densité de l’eau.
- Gestion
Si la densité est trop élevée, deux cas de figures. S’il manque de l’eau dans le système, compensez avec de l’eau osmosée. S’il ne manque pas d’eau, remplacez un peu d’eau salée par de l’eau osmosée.
Si elle est trop faible, diluez du sel dans de l’aquarium dans un récipient à part, et versez-le petit à petit dans l’aquarium pour atteindre la valeur désirée.
Le pH
Le pH (pour potentiel Hydrogéné) est une mesure de l’acidité de l’eau. Sa valeur est comprise entre 0 et 14. Plus le pH est bas, plus l’eau est acide, plus il est élevé, plus l’eau est basique (alcaline). Un pH de 7 correspond à une eau dite « neutre ».
En aquarium récifal, il est important de maintenir une eau basique. En effet, un pH trop bas (une eau donc trop acide), ralentit voire stoppe dans les cas extrêmes la formation du squelette des coraux.
Tandis que la respiration des différentes formes de vie, des bactéries aux poissons, fait baisser le pH, la photosynthèse assurée par les algues, y compris les algues symbiotiques des coraux, le fait monter.
- Valeur cible
Idéalement, le pH d’un aquarium marin doit être compris entre 8,1 et 8,4. Il évolue cependant au cours de la journée. Au matin, il n’est pas rare de le voir descendre entre 7,8 et 8, car les animaux ont respiré toute la nuit, tandis que la photosynthèse ne dégage pas d’oxygène durant cette période.
- Mesure
Il existe des tests gouttes pour mesurer manuellement et ponctuellement le pH. En aquarium marin, il est plus pertinent de s’équiper d’un pH-mètres. C’est appareil dont la sonde mesure en permanence le pH de l’eau. Veillez à les calibre régulièrement pour garder une mesure correcte.
- Gestion du pH
Une bonne oxygénation de l’eau, via un diffuseur et une pompe à air, ou par le biais de l’écumeur, aide à maintenir un pH élevé, ainsi que le dosage d’eau de chaux (attention, elle fait également augmenter calcium et alcalinité!). Comme évoqué précédemment, les algues, et indirectement les coraux, le font monter également au cours de la journée.
La dureté carbonatée – KH
La dureté carbonatée, ou KH, est une grandeur de mesure de la concentration en ions carbonates de l’eau. Ces carbonates sont des briques élémentaires servant à la construction du squelette des coraux durs et autres animaux bâtisseurs de structures carbonatées. De plus, ces ions jouent un rôle de tampon sur le pH. A faible concentration de carbonates (à un KH bas donc), le pH de l’eau fluctue beaucoup plus au cours de la journée.
- Valeur cible
Alors que le KH de l’eau de mer naturelle se situe autour de 7 dKH (°KH), il est recommandé en aquarium récifal de le maintenir entre 7 et 9 °KH. Il est possible, selon les autres paramètres, de le maintenir à une valeur plus élevée, (jusqu’à 12°) mais ce n’est pas la pratique la plus courante.
- Mesure
Le KH se mesure à l’aide de tests d’eau, à gouttes ou électronique (photomètre). Assurez-vous que les réactifs ne soient pas périmés, et les photomètres calibrés. Un test laboratoire ICP permet également d’avoir une mesure du KH.
- Gestion du KH
Il existe plusieurs méthodes de maintien du KH :
- L’ajout manuel ou par pompe doseuse de solution carbonatée.
- L’utilisation d’un Réacteur à Calcaire (ou Calcium), souvent appelé « RAC »
- L’utilisation d’une solution d’eau de chaux (attention : nécessite plus d’expérience et de surveillance)
Si le KH mesuré est beaucoup trop élevé (>12 °KH), vous pouvez changer de l’eau pour la remplacer avec de l’eau de mer à valeur « normale » pour diminuer petit à petit. Si la valeur est légèrement trop élevée par rapport à votre valeur cible, arrêtez tout ajout de carbonates pour que la consommation des coraux et autres animaux fasse diminuer progressivement le KH. Réajustez le dosage après avoir atteint la valeur désirée.
La concentration en calcium
Comme les carbonates, le calcium est un élément de base du squelette des coraux durs et autres animaux bâtisseurs. Il est également impliqué dans différentes activités métaboliques. Une valeur trop faible amène à la construction de squelettes fragiles, pas assez denses, et donc plus friables.
- Valeur cible
Il est idéal de maintenir le taux de calcium entre 400 et 440 mg/L.
- Mesure de la concentration en calcium
La concentration en calcium se mesure à l’aide de tests d’eau, à gouttes ou électronique (photomètre). Assurez-vous que les réactifs ne soient pas périmés, et les photomètres calibrés. Un test laboratoire ICP permet également d’avoir une mesure du calcium.
- Gestion du calcium
Il existe plusieurs méthodes de maintien de la concentration en calcium :
- L’ajout manuel ou par pompe doseuse de solution de calcium.
- L’utilisation d’un Réacteur à Calcaire (ou Calcium), souvent appelé « RAC »
- L’utilisation d’une solution d’eau de chaux (attention : nécessite plus d’expérience et de surveillance)
Si la concentration mesurée est trop élevée, en cas d’extrême écart, un changement d’eau avec une eau à bonne valeur permet de retourner dans l’intervalle voulu. Si l’excès n’est pas trop important, arrêtez les ajouts de calcium le temps que les animaux consomment suffisamment pour revenir à la concentration désirée.
La concentration en magnésium
Le magnésium est un autre élément majeur pour la santé des animaux de nos aquariums. Tout d’abord, il est également consommé par les coraux pour former leur squelette. Il est impliqué dans de nombreuses fonctions métaboliques. Certaines espèces comme les bénitiers sont réputées être grandes consommatrices et sensibles au manque de magnésium.
Du côté chimie, le magnésium empêche la précipitation du carbonate de calcium, réaction naturelle qui diminue KH et calcium. Celle-ci est ralentie par la présence du magnésium en bonne concentration dans l’eau.
- Valeur cible
Il est conseillé de maintenir le taux de magnésium entre 1300 et 1400 mg/L en aquarium récifal.
- Mesure de la concentration en magnésium
La concentration en magnésium se mesure à l’aide de tests d’eau, à gouttes ou électronique (photomètre). Assurez-vous que les réactifs ne soient pas périmés, et les photomètres calibrés. Un test laboratoire ICP permet également d’avoir une mesure du magnésium.
- Gestion du magnésium
La méthode la plus courante d’ajout du magnésium est la supplémentation manuelle ou sur pompe doseuse d’une solution de magnésium.
Si la valeur est trop haute, en cas d’extrême écart, un changement d’eau avec une eau à bonne valeur permet de retourner dans l’intervalle voulu. Si l’excès n’est pas trop important, arrêtez les ajouts de magnésium le temps que les animaux consomment suffisamment pour revenir à une concentration correcte.
Les nutriments : phosphates (PO4) et nitrates (NO3)
Maintenir la concentrations des nutriments à de bonnes valeurs est surtout essentiel pour la santé des coraux, et s’éviter des problèmes d’algues indésirables et disgracieuses. En effet, les poissons sont globalement plus résilients vis-à-vis des nitrates et phosphates.
Les coraux, immobiles et entourés d’eau, absorbent et profitent de ces nutriments grâce aux algues symbiotiques qu’ils hébergent. C’est leur principale source d’énergie, le reste provenant de la capture de proies par leurs polypes.
Bien que nécessaires, à leur survie, ces nutriments peuvent également leur être néfastes s’ils sont trop concentrés.
Dans le milieu naturel, les courants apportent et exportent sans cesse de l’eau tantôt riche, tantôt pauvre en nutriments.
En aquarium, milieu clos, et leurs sources sont multiples :
- La nourriture, de mauvaise qualité ou distribuée en excès
- Les déjections des animaux de l’aquarium
- Le mucus des coraux
- La dégradation de la matière organique morte
- L’utilisation d’une eau de mauvaise qualité.
- Valeur cible:
Chacun y va de son expérience, mais pour partir sur de bonnes bases sans aller dans les extrêmes, des concentrations entre 5 et 10 mg/L de nitrates et entre 0,05 et 0,1 mg/L de phosphates permettent la maintenance des coraux sans s’exposer à des explosions d’algues – sans en être à l’abri en cas de déséquilibre d’autres paramètres, ou l’utilisation d’un mauvais éclairage par exemple.
- Mesure
Les nitrates et phosphates se mesurent à l’aide de tests gouttes, photomètres. Certains tests ICP incluent des valeurs de nitrates et phosphates, ou du moins de l’azote et phosphore qui les composent.
- Gestion
Pour diminuer nitrates et phosphates, plusieurs solutions sont exploitables, selon les causes de leur forte concentration et les valeurs mesurées :
- Bannir l’eau du robinet de l’aquarium : utilisez uniquement de l’eau osmosée, et entretenez correctement l’osmoseur (changement des cartouches et membrane).
- Optez pour une nourriture de qualité, et dosez convenablement. Tout doit être consommé en moins de 2 minutes !
- L’écumeur est un appareil permettant d’extraire les matières amenant aux nitrates et phosphates.
- Utilisez des médias ou résines de filtration (en respectant les notices !).
- Créez un refuge à macroalgues dans votre circuit d’eau. Les algues supérieures consomment nitrates et phosphates pour croître.
En cas de valeur trop basse, il existe des solutions pour en ajouter dans votre aquarium. Mesurez alors régulièrement leur concentration pour ajuster le dosage et les maintenir aux taux voulus.
Si vous voulez en connaître davantage sur les nitrates et phosphates, découvrez notre vidéo sur ce sujet !
Voilà ce qui conclut ce dossier sur les paramètres basiques à connaître en débutant en aquariophilie récifale. Pas de quoi s’affoler, ce sont souvent des actions simples qui permettent de les gérer correctement.
