Une association Corail et Éponge, c’est possible ?
Lors de nos pérégrinations, nous somme tombés sur un phénomène plutôt rare, mais de plus en plus observé dans une toute petite partie de récif en Indonésie. Cette rareté du monde corallien consiste en une association entre un corail du genre Tubipora et une éponge du genre Mycale.
Des colonies de Tubipora aux formes très différentes
En effet, ces observations se font dans le nord de Komodo en Indonésie, entre les îles de Sumbawa et Flores, le célèbre parc national où les fameux Dragons résident. Sur les récifs de certaines îles du nord du parc, des colonies de Tubipora prennent une forme jamais observée ailleurs, similaire à celle des éponges. La présence de polypes de coraux mous avec leurs 8 tentacules classiques sur cette structure de Spongiaires a attiré notre œil curieux. En général les différentes espèces de Tubipora ont des polypes très différents, avec une simple ou double rangée de pinnules sur les tentacules, ou des polypes de couleur et taille différentes. Mais là, la forme des colonies paressait étrange. Mais une observation rapprochée a permis de confirmer que l’on était en présence de Tubipora dont la forme était complètement unique.
Les tubes
Les deux organismes ont une structure intime commune en forme de tubes. Les colonies de Tubipora sont composées de tubes solides comprenant chacun un polype. Les éponges se forment autour de tube semblables à des canalisations permettant la circulation de l’eau dans la colonie. Chaque tube dispose de milliers de siphons inhalant à l’extérieur de la colonie et de siphons exhalant au centre.
Quels bénéfices ?
Cette structure semble bien favoriser l’éponge, car elle peut coloniser les interstices entre les tubes, ce qui lui offre la structure nécessaire à sa construction et une protection incroyable. Cette espèce ne possède pas de spicules structurels car la structure est apportée par le corail.
L’éponge tapisse l’intérieur de la colonie de corail entre les tubes, et favorise un courant d’eau pénétrant par les cotés des cheminées et sortant par le dessus. Somme-toute un fonctionnement semblable à l’architecture classique d’une éponge.
Si les bénéfices pour l’éponge sont assez clairs, ceux pour le corail semblent plus discrets. Aucun signe d’agression entre les deux protagonistes n’a été observé et les polypes coralliens sont complètement fonctionnels, avec leurs cellules urticantes opérationnelles, mais pas utilisées contre l’éponge.
Une explication pourrait être que l’éponge défend le squelette de corail contre la colonisation par d’autres organismes qui pourraient endommager le squelette. On sait aussi que les éponges produisent de nombreuses substances avec des propriétés diverses comme antibiotiques, antifongiques … ce qui pourrait être bénéfique pour le corail.
Une théorie possible est qu’en échange de la construction de la structure, le corail peut profiter du courant créé par l’éponge et pré-filtrer l’eau avant que celle-ci ne pénètre dans l’éponge. Les polypes de cette variété de Tubipora sont particuliers, car ils sont plus petits que la moyenne et équipées d’une double rangée de spicules, qui favorise la filtration de petites proies.
Un mystère de plus à élucider
Le mystère reste complet en ce qui concerne le mécanisme par lequel l’éponge force le corail à adopter cette forme de cheminée caractéristique. Comment empêche-t-elle des polypes de coraux d’émerger dans la cheminée ?
L’autre grand mystère consiste à comprendre pourquoi cette association (qui semble si intéressante pour les deux partenaires) n’est observée que dans cette zone très restreinte du nord du détroit entre Sumbawa et Flores ?
Les océans sont pleins de mystères passionnants, et plus on essaie de les comprendre plus on est confus. Une vie n’est pas suffisante pour répondre à toutes ces questions, mais elles la rendent tellement plus passionnante.