Mesurer facilement et correctement la salinité

Posté le 13 mai 2017 par

Voici quelques informations pour vous aider à mieux vous y retrouver dans les mesures de vos aquariums entre la salinité, la masse volumique, la masse volumique spécifique et la conductivité toutes impactées par la température. Comprendre pourquoi nous pouvons obtenir des valeurs différentes entre équipements de mesures, même d’excellentes qualités, si nous n’y prêtons pas attention. Que faire pour se simplifier la vie tout en ayant de bons résultats ? Nous pouvons ici atteindre ce but : obtenir et maintenir la salinité désirée de son bac.

L’eau de mer et la salinité

L’eau de mer naturelle comporte un certain nombre de sels dissous, toujours dans les mêmes proportions, mais avec une quantité différente selon leurs situations géographiques. La quantité de sels (en gramme) par kilogramme d’eau est appelée Salinité (Salinité Pratique). La salinité, qui est une quantité sans unité, peut aller de moins de 10 en mer baltique à 40 en mer rouge. On considère une valeur ‘standard’ de 35 pour l’océan. Pour plus d’information, reportez vous à notre précédent dossier.

Echelle de salinité
NASA

Ce que l’on mesure et l’impact de la température

Comme il n’est pas pratique et extrêmement difficile de faire évaporer à 100 % un kilogramme d’eau de mer pour peser la quantité de sels restante, on utilise diverses autres méthodes indirectes.

Dans nos aquariums, on peut mesurer la réfraction de l’eau, la masse volumique, la conductivité ou la Chrlorinité. Avec ces mesures et une conversion (ou plusieurs), on peut ainsi connaitre la fameuse salinité de son bac. La ‘Salinité’ que l’on veut avoir ici est la Salinité Pratique Sp (oui, il y plusieurs ‘salinités’ mais cela a peu d’intérêt pour l’aquariophile).

Tout d’abord un peu de vocabulaire multilingue, avec un tableau pour éviter toute confusion (elles sont courantes et faciles à faire). Pour compliquer le tout entre le Français et l’anglais, la virgule française pour les décimales est un point pour les anglo-saxons qui séparent aussi le millier avec un point au lieu d’un espace pour les français !

FrançaisAnglaisUnitéFonction de la température
Salinité Pratique (Sp)Practical Salinitysans uniténon
Masse volumique (ρ)Densitykg/m3oui
Masse vol. spécifique (densité relative) (SG)Specific Gravitysans unitéoui
Conductivité (C)ConductivitymS/cmoui

On remarque donc que l’on ne peut parler de masse volumique, masse volumique spécifique, conductivité sans mentionner la température de l’eau concernée.

Voici un quelques valeurs pour Sp = 35 pour diverses températures que l’on peut ‘mesurer’ avec nos systèmes pour aquariophiles.

Température (°C)
152024252627
Salinité Pratique353535353535
Masse volumique (kg/m3)
1026,01024,81023,61023,31023,01022,7
Masse vol. Spécifique (réf. à 20°C)1,02781,02661,02551,02521,02491,0246
Conductivité (mS/cm)
42,947,952,053,154,155,2

Toutes ces valeurs sont basées sur la même salinité (pour la même eau où seule la température change) !

Le tableau est calculé avec le calculateur utilisant la méthode TEOS-10 présenté précédemment. Avec le calculateur vous pourrez avoir les valeurs pour d’autres salinités; n’hésitez pas à faire varier la température pour vous convaincre de son impact significatif sur la ‘masse volumique’ et la conductivité.

Les méthodes de conversions sont prévues pour de l’eau de mer naturelle. Les différences de constituant entre l’eau de mer naturelle et synthétique peuvent avoir un impact sur les résultats.

Le cas ‘Specific Gravity’

Attention à la confusion parfois faite entre ‘Specific gravity’ (Masse volumique spécifique) et masse volumique ! L’usage correcte de cette mesure est parfois difficile sans en maitriser parfaitement les subtilités. Elle est, à mon avis, la source de nombreuses confusions avec la(les) température(s).

‘Specific Gravity’ = ‘Masse volumique spécifique’ = masse volumique de l’eau de mer / masse volumique de l’eau pure (à une température de référence donnée … qui peut varier selon les appareils).

Dans le cas de réfractomètres on trouve parfois noté (voir aussi pour ATC) : d 20 20 ou SG 20 20. Le 20 de l’indice (en bas) est la température de référence pour l’eau pure utilisée pour la création des graduations de l’échelle SG !

Si votre appareil le permet, utilisez l’échelle de salinité, car la ‘Specific Gravity’ peut nécessiter une conversion supplémentaire due à la température de calibrage & étalonnage initiale de l’appareil. C’est assez complexe à utiliser pour un comparatif de mesures entre différents appareils (source de bien des soucis et de discussions).

Les appareils de mesures

Je ne vais pas passer en revue les bons usages des appareils de mesure; il faut toujours lire les notices d’utilisation et se renseigner, mais je vais vous mentionner quelques points génériques à connaitre.

Selon l’appareil utilisé, la température de l’eau du bac et de l’eau de mesure a un impact significatif (même s’il est différent).

Mon appareil est ATC, fait-il tout, tout seul ?

L’ATC n’ajuste pas la valeur mesurée de la salinité à la température de l’eau de l’aquarium ! La Compensation Automatique de Température compense seulement les quelques degrés d’écarts entre la température ambiante de la pièce de mesure et la température à laquelle le réfractomètre a été calibré.

Mon appareil comporte un tableau de conversion, pour quelle raison ? Le tableau de conversion, parfois fourni, permet de convertir les valeurs lues sur l’appareil qui n’est pas étalonné à la température de l’aquarium, en valeurs valides à la température de l’aquarium !

ATC 20 / SG 20

Dans d 20 20 ou SG 20 20, le 20 de l’exposant correspond à la valeur de la température pour l’ATC.

Étalonner régulièrement ses appareils de mesure

En dehors des aéromètres, il faut étalonner soi-même régulièrement son appareil. Si on voulait être extra rigoureux, il faudrait le faire avant chaque mesure.

Puis-je utiliser de l’eau déminéralisée ou osmosée pour étalonner mon appareil à 0 ? Oui, au pire et faute de mieux pour un réfractomètre, mais à proscrire à mon sens pour un conductivimètre ! Évitez d’utiliser  l’eau du robinet et privilégiez l’eau déminéralisée, même si l’erreur est de l’ordre du trait (c’est le cas de le dire).

Néanmoins, il est toujours préférable d’étalonner un appareil avec une solution étalon ayant une valeur proche de la valeur cible à mesurer. Dans notre cas, utiliser une solution S=35 ou C=53 mS/cm (selon l’appareil à étalonner) est la bonne solution. L’idéal pour éviter tous les artifices de compensation est une eau de mer à S=35 !

Comparez les deux étalonnages à S=0 et S=35, vous verrez par vous-même une différence (selon l’équipement et contre-indication du fabricant). Pour éviter toute surprise, l’utilisation d’une solution étalon de valeur proche de ce que l’on doit mesurer est primordial. Cela est trop souvent mésestimé, comme l’étalonnage lui-même.

Mesurer une eau de mer naturelle et artificielle à-il une influence ?

Dans l’absolu oui, les divers sels qui composent l’eau de mer ont leur propre influence sur la mesure. Dans la pratique, les équipements aquariophile ne permettent pas de mesurer et de qualifier finement la différence éventuelle; de même, pour une dérive due à une consommation excessive d’un des constituants de l’eau par rapport aux autres.

Comment faire pour avoir de bons résultats sans ‘trop’ se compliquer la vie ?

On comprend bien, avec les informations précédentes, que selon l’appareil, l’étalonnage et l’échelle utilisée, on obtient des résultats différents qui ne sont pas simples à comparer instantanément. Obtenir la bonne valeur finale peut être un vrai casse-tête avec certains équipements. On peut utiliser les tables de conversion, quand elles sont fournies mais cela reste un peu pénible.

Comparer les relevés d’un réfractomètre et d’un aéromètre, par exemple, n’est pas forcement simple. Et je ne parle même pas de la qualité de l’équipement !

Mais pas de panique, on peut s’en sortir assez simplement quand même, pour suivre la salinité dans le temps et la garder à une valeur appropriée en suivant quelques principes :

  • Avoir un équipement de mesure spécial eau de mer (oui je suis sérieux, c’est impératif !),
  • Utiliser un appareil de qualité. Si vous utiliser un aéromètre, il en faut un long (impact sur la précision),
  • Avoir un équipement ATC, si possible ATC 25 (ou au plus près de la température du bac),
  • Si avec l’appareil est fourni une table en fonction de la température, utilisez là,
  • Étalonner son équipement régulièrement, si possible avec une solution étalon à S=35 pour la salinité ou C=53 mS/cm pour la conductivité (ou au plus près de la valeur du bac),
  • Privilégier la lecture de la Salinité et non SG, Masse Volumique, … cela pourra vous éviter bien des déboires (que vous ayez compris ou pas compris ces explications).

Pour ne rien convertir à d’autres températures que 25 °C : acquérir un équipement électronique effectuant seul les conversions en fonction de la température pour lire la salinité ! Mais les étalonnages, sérieusement faits, restent de mise.

MAIS ne jamais oublier que la stabilité des paramètres est extrêmement importante: ne jouez pas à faire fluctuer la salinité. Reproduire la mesure est aussi primordial. Avant tout changement important de salinité, qui sera de toute manière fait lentement, refaire les mesures avec divers appareils et personnes pour vous assurer des résultats probants.

Exemple pour comprendre les repères

Impact de l’étalonnage par l’exemple

Voici 3 solutions étalons que j’ai utilisé pour ces tests :

Tests effectués avec le réfractomètre RedSea (eau me mer 25,6 °C, pièce 22,2 °C). L’eau de l’aquarium est de l’eau à partir de sel ReefCristal.

Lire les opérations dans l’ordre du tableau : 1, 2, 3 … 8.

OpérationLiquide utiliséSG (*)
S (*)
1EtalonnageEau osmoséens0
2MesureEau aquarium102333
3MesureEtalon AccuraSea1024-34-
4EtalonnageEtalon AccuraSea102535
5MesureEau aquarium102434
6EtalonnageEtalon Tridacna102535
7MesureEau aquarium102434
8MesureEau osmoséens1

(*) Lecture directe approximative, mais les différences sont là !

Les deux solutions étalons donnent un résultat très proche. On observe une très légère différence, autour de l’épaisseur d’un trait sur l’échelle de mesure mais observée systématiquement.

On observe une différence de 1 pour la salinité entre un étalonnage à S = 0 et à S = 35. Cette différence peut être différente selon les appareils. On observe ici qu’il est donc toujours préférable d’étalonner les appareils à une valeur proche de la mesure.

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